samedi 3 février 2007

Débat participatif à Ris-Orangis sur la vie chère : le compte-rendu

Kheïra GENC, animatrice locale des socialistes rissois, lance ce premier débat participatif, le premier d’une série de quatre organisés par Thierry MANDON, Président des comités de soutien de Ségolène ROYAL pour la 9ème circonscription de l’Essonne. Elle remercie de leur présence les représentants des partis politiques, en plus du Parti Socialiste, qui soutiennent la candidature de Ségolène ROYAL : Denis CERISY pour le Parti Radical de Gauche (PRG), et Marcus M’BOUDOU pour le Mouvement Républicain et Citoyen (MRC).

Elle rappelle la démarche souhaitée par la candidate aux élections présidentielles, d’écoute et de participation des habitants dans une première phase de la campagne cruciale pour remettre en contact la politique et le citoyen, pour recréer le pacte républicain.

Les citoyens sont les mieux placés pour exprimer les problèmes qu’ils vivent et les propositions sur les sujets retenus dans ces débats, dont celui de ce soir : la vie chère. Elle présente les deux invités de la soirée, connaisseurs de la thématique : Solange LOTTE, militante d’une association de consommateurs sur la question du surendettement, et Farid JITLI, ancien syndiqué de l’usine LU qui s’exprimera sur les difficultés rencontrées par les bas salaires pour vivre et survivre.

Le thème de la vie chère est vaste, il regroupe à la fois la question du logement (dont la part dans le budget des familles explose depuis 2002 et 2004, et représente aujourd’hui près de 30% pour les locataires comme pour les propriétaires), la question du transport (15% du budget), la question de l’explosion des coûts de l’énergie, etc…Quelques thématiques à développer au cours de la soirée en plus de tout ce qui est lié à l’augmentation du coût de la vie, l’appel au crédit, et qui vise en premier les bas salaires.

Elle rappelle enfin le principe du débat participatif : une phase d’écoute, de prise de note, puis de remontée à Ségolène ROYAL pour une synthèse globale.

Solange LOTTE introduit sur la question du logement, et souligne que toutes les ramifications du coût du logement contribuent à l’endettement des familles. Des familles de plus en plus sensibles au prix de leurs achats quotidiens, notamment depuis l’arrivée de l’euro, des contraintes qui reviennent chaque mois voire chaque jour, comme le loyer (qui atteint des records historiques), les charges d’énergie, les dépenses incompressibles auxquelles d’ajoutent les abonnements mensuels (téléphone, Internet, télévision). Ainsi, le « reste disponible » devient de plus en plus mince. Pour les dépenses d’abonnements, il convient également de ne pas culpabiliser les utilisateurs sur des frais souvent jugés par les banques ou organismes comme superflues : ces dépenses représentent en moyenne moins de 5%.
Le logement reste le poste de dépense le plus important, tant pour les locations dans le logement social que dans le secteur privé ou pour les acquisitions. Ceux qui achètent font en effet face à des problématiques souvent sous-estimées, comme la question du coût des impôts locaux qui viennent se greffer à leur remboursement de prêt mensuel.
Concernant l’immobilier, on est confronté de plus en plus à de véritables scandales, avec la vente de chambres de bonnes minuscules,mais aussi des logements indécents, insalubres en sous pentes, dans les greniers, parfois dans des caves, à des prix exorbitants pour un rapport qualité /prix nettement insuffisant.

Les ressources des familles, elles, n’augmentent pas, ou peu, et l’on constate une explosion des impayés, ainsi qu’une augmentation des expulsions de familles qu’il est très difficile de reloger car personne n’en veut plus.

Pour tenter de remédier à ces diverses hausses des prix, on constate une forte augmentation du recours au crédit, puis un autre et encore un autre : l’engrenage terrible débute, et il devient extrêmement difficile de s’en défaire.
Une commission de surendettement existe bien pour des réaménagements de dettes, ou pour l’obtention de délais de recouvrement, mais les procédures sont complexes, et parfois les contraintes disproportionnées par rapport à un nécessaire maintien du niveau de vie quotidien. Il est en effet parfois demandé aux familles de vendre leur appartement, ou dans de nombreux cas, le « reste pour vivre » est trop mince pour permettre aux personnes de poursuivre une vie normale.
Il convient enfin de dénoncer les pratiques des banques ou organismes de crédit qui ponctionnent des frais financiers considérables, parfois même supérieurs au

Farid JITLI poursuit en soulignant que le vrai problème des familles (et plus particulièrement encore pour les chômeurs et les travailleurs pauvres) est ce qu’il leur reste de disponible pour vivre et consommer, une fois le loyer payé, les impôts directs et indirects. Comment dès lors assurer à chacun un minimum pour vivre décemment, se nourrir, s’habiller, envoyer leurs enfants à l’école ? Quelques idées peuvent être avancées, notamment sur la question fiscale : rendre les impôts plus progressifs, supprimer la TVA, impôt le plus injuste, sur les produits de première nécessité, essayer d’améliorer le net disponible pour que chacun puisse vivre décemment.

Interventions de la salle

EMPLOI
 Que faire contre les patrons voyous qui licencient, délocalisent (comme ALTIS dernièrement, 480 salariés sur la sellette). On subit tout ça, que faire contre ces gens qui se permettent tout ? Ils n’ont pas de problème eux, pour vivre et partir en vacances
 Plus possible de faire face, avec trois enfants, seul, pas d’aide car on gagne ce qui est considéré comme correct, on va finir par travailler au black, en piquant du boulot aux autres, on ne peut rien faire d’autre
 Est-ce qu’un gouvernement réformateur pourrait voir à ce que l’on ne ferme plus les usines, que ceux qui jouent avec l’argent cessent de jouer aussi avec ceux qu’ils emploient, taxer les délocalisations pour empêcher les fermetures d’usine, ou assurer aux salariés un salaire de plusieurs années pour indemniser ceux qu ont perdu un emploi
 Sur la question des licenciements boursiers : je suis scandalisé par ce qui arrive car ces grandes entreprises ont reçu des milliards de subventions payées par nos impôts : on a fini par les doner aux actionnaires et aux fonds de pension américains. J’espère avec Ségolène que ça ne pourra plus se passer avec une principale action à proposer et mettre en œuvre : soumettre l’obtention de subventions à la question du maintien de l’emploi et de garanties pour les salariés.
 Certaines choses expliquent des délocalisations des grands groupes, qui sont parfois obligés par la grande distribution de donner ce que l’on appelle les marges arrières, une partie du chiffre d’affaires. Chez LU en 50 ans, ce reversement est passé de 15% à 53%. Malgré cela, ces entreprises engrangent des bénéfices grâce aux délocalisations, à la diminution des coûts de production. A l’étranger, en Tchéquie ou en Pologne, les conditions de travail sont autres : ils travaillent 6 jours sur 7, avec des salaires médiocres, ce qui assure des bénéfices aux entreprises. Mais il ne faut pas mettre des modes de vie si différents en concurrence.
 Lorsque l’on travaille depuis des années, qu’on perd son emploi et qu’on a passe des années au chômage, quand on retrouve un emploi, par chance, on perd beaucoup en salaire. J’ai 38 années d’expérience dans la comptabilité, j’ai retrouvé un boulot mais au SMIC, inférieur à ce que je touchais aux ASSEDIC. Et on est menacé d’être radié si on accepte pas. Pourtant, nos dépenses sont les mêmes, tous les frais engagés quand on travaillait restent, on ne touche pas les aides avec nos revenus. Il faut toujours repartir à zéro mais pourtant la vie continue quand même.
 Je remarque que la majorité des marques de vêtements aujourd’hui viennent de Chine, et de plus en plus. Comment peut-on arriver à ce que ces produits, fabriqués souvent par de la main d’œuvre très peu chère, voire même par des enfants qui travaillent à la chaîne comme des esclaves, soient taxés ? Il faut freiner cette situation, cette exploitation des autres qui est aussi dangereuse pour nos emplois.
 Sur les produits de Chine et d’ailleurs : on a le même problème simplement en Europe, entre les pays de l’est et nous. Il y a une telle différence de niveau de vie, de salaire et de coût des matières premières. Tant que ce ne sera pas harmonisé, fiscalement et socialement, on a pas fini de voir des patrons voyous délocaliser à l’intérieur même de l’Europe, ou encore plus loin. Le patron de Danone implante des usines au Bengladesh maintenant. Avec 23000 salariés en Chine, je vous laisse imaginer le coût de la main d’œuvre. Il faut réguler cette mondialisation sauvage à l’intérieur de la planète, mais ne serait-ce déjà qu’en Europe.
 Aujourd’hui les salaires sont tirés vers le bas. Il a existé pour LU après la fermeture de l’usine, une cellule de reclassement. On a constaté des pertes de salaire de 30 à 40%, même chez les ingénieurs. Une jeune femme de 30 ans, ingénieur à l’usine LU, est devenue chef de production à Cherbourg, responsable de 45 personnes, pour 7000 francs par mois, il faut imaginer les autres !
 Si Ségolène passait, il faut multiplier les places en crèche, dans le public mais aussi en entreprise car beaucoup de femmes ne travaillent pas à cause des enfants. Ma femme a refusé beaucoup d’offres car on n’a pas trouvé de garde, si c’est pour gagner le SMIC pour juste payer la nourrice, c’est inutile.
 Il a une véritable concentration des richesses contre laquelle il faut lutter. Dans le milieu du bâtiment par exemple, les prix ont suivi le cours de l’inflation depuis 10 ans, par contre les prix des matières premières (près de 40% du coût global) ont pris de 10 à 15% en 5 ans. Pour maintenir les marges, la seule solution a consisté à tirer sur les salaires. On s’aperçoit ainsi que ce sont les salariés qui ont payé les bénéfices de ceux qui encaissent les profits. Toutes ces entreprises ont vu leurs bénéfices exploser, et les salariés ont payé. On a renié pour maintenir les marges sur les revenus des salariés et pas sur le dos des multinationales qui transforment cette matière première nécessaire.
 On oublie une chose : le salaire de la personne au foyer, reconnu officiellement comme un travail avec salaire pour être employé, pour alléger les crèches et compenser des inégalités.
 Je veux interpeller Madame Royal par rapport aux emplois précaires ou aidés. Il existe beaucoup de dispositifs mais certains patrons en abusent au détriment des contrats de droit commun. Ces derniers temps, pour la comptabilisation des baisses du chômage, énormément de contrats très précaires ont été utilisés dans les établissements scolaires. C’est une grande fragilité pour ces gens. Au départ ces contrats devaient être des phases d’insertion et non des emplois pérennes.
 Il faut faire attention quand on prône la disparition des emplois aidés, c’est la proposition de Sarkozy qui veut tous les supprimer et les remplacer par les CNE.
 Il existait il y a quelques années des emplois fixes pour s’occuper des enfants lourdement handicapés dans les écoles (les AVS). Ces contrats n’existent plus, ils ont été remplacés par des CAE, sans aucune formation et avec un emploi précaire, pour une seule année scolaire, avec donc un turn-over déconcertant pour les enfants.

COÛT DE LA VIE
 ne pas penser seulement aux difficultés quotidiennes mais aussi aux vacances : ceux qui gagnent peu d’argent ne peuvent pas partir en vacances (voir le prix des mobil home à plus de 1000 euros la semaine, ou le prix d’un séjour à la montagne), souvent les parents envoient les enfants en colonies et ne prennent eux-mêmes qu’une seule semaine de vacances
 Sur la question des vacances, il n’y a pas que les locations qui sont chers et qui empêchent les gens de partir plus d’une semaine maximum, il y a aussi le coût de la vie sur place, sur le littoral. Il faut jouer sur la TVA car Chirac a diminué les impôts sur le revenu et à la place fait tout augmenter
 Accès à la culture : si on a la chance d’avoir le centre Desnos à Ris-Orangis, l’ascenseur social doit pouvoir fonctionner pour tout le monde. On a envie aussi d’aller à Paris, au théâtre mais on ne peut plus le faire. Avant on gagnait beaucoup moins et on s’en sortait, mais aujourd’hui on ne s’en sort plus, on est tiré vers le bas, on est en train de s’enfoncer, on est obligé de compter sans arrêt, on ne vit pas, il n’y a pas de qualité de vie, le quotidien n’est pas facile pour les gens.
 Les gens s’enfoncent de plus en plus, il y a de plus en plus de surendettement car les gens se laissent enfoncer, de plus en plus de crédits. Qu’est-ce que le gouvernement peut faire contre ceux qui arnaquent les pauvres gens, on est relancé tout le temps par les organismes de crédit. Une femme a fait 7000 francs de dettes sans présenter une seule fiche de paie, c’est inadmissible. Les jeunes surtout s’endettent de plus en plus, une vraie réflexion doit être menée contre ces gens qui proposent des crédits avec des taux de 20%, et qui profitent de la misère des gens.
 Ces crédits sauvent aussi, moi je les ai utilisés, pour vivre il faut trois banques pour utiliser les trois découverts, on est obligé.
 Il faut aussi penser aux banques, à ces services faits par la banque qui ponctionne des frais bancaires exorbitants. Tout est par prélèvement automatique, il n’y a plus aucune maîtrise de votre compte en banque. Et on vous taxe de 13 euros pour faire supprimer un prélèvement automatique. Il n’y a pas que des patrons voyous, mais aussi des banquiers voyous. Quand vous êtes dans le besoin ou que vous rencontrez des problèmes de paiement, que fait la banque ? Elle ponctionne des agios.
 Moi je suis sans emploi, je ne peux pas ouvrir de compte dans une banque, je n’ai pas le droit au crédit, je ne touche que 400 euros par mois d’indemnité avec un enfant, et mon loyer est déjà de 500 euros. Quand je vais voir pour des aides, on me débloque 100 euros, qu’on me donne pour mon enfant, et pour ça je dois remplir un tas de papiers, ça me coûte 20 euros pour faire les photocopies, prendre le bus pour aller à droite et à gauche.
 Le crédit revolving est la plus mauvaise des choses, et est fortement déconseillée par les associations de consommateurs. Il faut préférer la négociation d’un découvert car ou l’obtention d’un prêt fixe, car les crédits revolving sont étudiés pour que jamais vous ne puissiez rembourser.
 Quand j’ai eu des problèmes d’argent je suis allé voir une association de consommateur. On m’a demandé si j’avais ma carte, on m’a demandé de prendre ma carte à 50 euros avant de me renseigner.
 Sur les dépenses de transport, j’habite ris, je travaille à Montreuil, je n ‘ai pas de voiture par choix pour contribuer à l’écologie. Je paie donc une dépense de transport mensuelle importante et j’attends d’un futur gouvernement socialiste qu’il veille à limiter l’augmentation des dépenses de transport. Je comprends la nécessité des investissements, du nettoyage mais je ne vois pas pourquoi il y a cette augmentation obligatoire du 1er juillet. Je ne ferai pas de commentaires sur le fonctionnement de la ligne D du RER mais il me semble que les sommes que nous payons pourraient être consacrés à l’amélioration de cette ligne.
 Sur la question du transport : la carte orange est trop chère pour un service non satisfaisant. La ligne D, on va péter les plombs.
 Il y a une réelle difficulté à trouver des indices de coût de la vie car les entreprises de grosse distribution ont réussi à détourner ces calculs. En suggestion, il faudrait demander à calculer le coût des produits au litre ou au kilo pour mesurer le coût de la vie et son augmentation. Sur les circuits de distribution : les producteurs qui s’échinent toute la vie touchent un tout petit prix sur leur production, alors que les consommateurs se retrouvent avec des prix astronomiques. C’est à cause de l’augmentation des coûts de transports et autres bien sûr, mais des études sur les marges sont à mener sérieusement.
 J’ai trois questions à la candidate : que faire pour le logement pour tous dans le programme socialiste ? comment faire pour augmenter les bas salaires beaucoup plus que les moyens ou les forts pour équilibrer les revenus ? Que faire avec les gros salaires, et l’impôt sur la fortune ? L’enlever ou le laisser ?

SANTÉ
 La vie chère concerne aussi la santé, devant laquelle les gens ne sont pas égaux, on doit faire face à une médecine à deux vitesses. Par exemple, si l’on prend le cas d’une personne qui vient faire un scanner dans un hôpital public, elle téléphone pour un rendez-vous, avec un délai de 2 à 3 mois. Quand elle est victime de trop de souffrance, elle rappelle et on lui propose un rendez-vous rapide mais dans le secteur privé, elle paie donc l’acte médical beaucoup plus cher. Alors que les médecins exerçant dans le public ne peuvent exercer en parallèle dans le privé plus de l’équivalent de 20% de ses honoraires, cette règle n’est pas respectée. Il y a également un problème dans le parcours de soin : on ne peut consulter que quatre spécialistes sans passer au préalable par un médecin traitant, ce qui oblige, pour beaucoup de personnes qui consultent un médecin spécialiste, à régler la consultation de leur médecin traitant puis la consultation du médecin spécialiste.
 Mon fils a eu un accident du travail. Il touche 4,56 euros par jour par la Sécurité sociale, alors qu’il a même fallu attendre un mois et demi à deux mois pour se faire reconnaître accidenté du travail. Il n’y a pas trop de problème pour mon fils car il habite chez nous, mais comment font les autres ? Il faut accélérer les remboursements de la Sécurité sociale.
 J’ai été arrêtée 8 mois, de juillet jusqu’à novembre, pas payée, avec tout ce qui va avec (problèmes de banque, de loyers en retard) et si je n’avais pas eu mon fils, je serais morte de faim.
 Il n’y a pas que des délocalisations il y aussi des usines qui restent en France, et qui pratiquent souvent du harcèlement moralsur les gens pour éviter de les licencier et pousser à la démission. J’ai connu une femme presque poussée au suicide.
 Sur le parcours de santé, j’ai une maladie lourde cardiaque depuis toujours et suis porteur d’un stimulateur cardiaque, et donc suivi par des spécialistes. A l’époque, j’étais pris en charge en entier par la Sécurité sociale. Aujourd’hui, je ne suis plus suivi par le milieu hospitalier, mais je suis renvoyé vers les spécialistes de ville déconventionnés, où les soins sont très chers, jusqu’à 500 à 600 euros chaque année d’avance avant remboursement. Comment font les familles en difficulté ? Il est impossible de faire cette avance. Comme il est scandaleux de devoir payer 1 euro par acte médical.

LES JEUNES
 Il faut aborder la question des jeunes, et particulièrement les jeunes qui font des études, en parlant concret comme le souhaite Ségolène. Il est inadmissible de pousser les jeunes à faire des études pour au final les mettre dans la précarité : certains se prostituent même pour avoir les moyens de survivre, l’université devient chère pour s’inscrire, les transports coûtent aussi, il n’y a pas suffisamment de bourses. Quand le budget des parents est juste, il est impossible aux enfants de s’en sortir, avec la nourriture, un peu d’argent de poche, sachant qu’ils restent pourtant de plus en plus tard chez leurs parents. Il n’est pas normal que les jeunes, les cerveaux de demain pour construire la France, qui ont la volonté, soient abandonnés, faute d’aide suffisante. La France est aujourd’hui dans l’Europe, et pourtant il y a peu de possibilité d’aller faire des études dans d’autres pays comme l’Angleterre. Les familles sont contraintes à de lourds sacrifices par choix.
 Il faut revenir sur les difficultés rencontrées par les étudiants pour faire leurs études à l’université. C’est l’ élite de demain. Le schéma pour arriver au sommet de leurs études est semé d’embauche. Ils sont obligés de travailler pour joindre les deux bouts, de jongler avec les transports publics, rencontrent des problèmes pour manger. Les restaurants U sont souvent éloignés, ou bondés. Il faut permettre aux étudiants de parents de revenus modestes ou qui ont plusieurs enfants, des prêts remboursables ultérieurement. Les étudiants diplômés ne trouvent pas d’emploi malgré leurs études, et quand ils trouvent un logement, les parents doivent encore se porter caution, c’est inadmissible.

LOGEMENT
 Je louais un appartement 520 euros par mois dans le locatif social, mais j’ai perdu mes droits à l’APL car ma fille a plus de 20 ans. J’ai acheté un appartement dans le privé, qui me coûte aujourd’hui 430 euros par mois, sur 25 ans. Avec 16000 euros par an, ce qui n’est pas énorme, je n’ai plus de bourse départementale (aide à la restauration pour le collège) car je gagne trop.
 Sur la question de la santé, quand on va dans un centre médical, les mutuelles ne remboursent qu’au bout de 4 mois, alors que si on va chez un dentiste normal on est remboursé tout de suite.
 Il existe des aides multiples, beaucoup de gens ne s’y retrouvent plus. Rien que pour le logement : comment comprendre la différence entre une allocation logement et l’APL, quelle est la différence ? Pourquoi un système plutôt qu’un autre ? Ce système d’aide est illogique. Il faut simplifier les aides, que les gens puissent s’y retrouver dans leurs droits, pour le logement ou pour d’autres domaines. Il faut remettre tout à plat pour balayer tous les problèmes. Tout le monde est perdu, ça change continuellement. Il faut aussi savoir qu’avec certaines aides, quand vous avez le droit à trop peu, elle n’est pas versée du tout.
 Sur le prix des loyers : comment faire pour freiner cette hausse exponentielle, car aujourd’hui le poste loyer est à près de 30%, les impôts à la même hauteur environ, il va nous rester quoi pour consommer ? Il faut mettre en place un système pour réguler ces hausses.
 L’offre de logements est insuffisante, que ce soient les logements sociaux ou intermédiaires. Dans les communes, on attaque les maires sur le non-respect des 20% de logements sociaux, mais ils nous répondent que les terrains sont trop chers, mais on pourrait quand même réquisitionner les terrains de l’État pour construire du logement social. Il est possible de jouer au niveau du foncier.
 J’habite un F4, quand j’ai divorcé, seul avec mon fils, j’ai voulu un logement plus petit. On m’a répondu que je ne gagnais pas assez. Je suis donc resté dans mon logement trop grand. On m’a ensuite proposé un appartement insalubre. J’ai pu garder mon F4 grâce à l’APL mais dans mon immeuble je vois beaucoup de grands appartements avec une personne seule dedans, alors que parfois, ils sont 6 ou 7 dans un F3.
 Sur la question de l’accession à un logement, la situation actuelle du coût du logement et du foncier fait qu’une personne salariée en CDI touchant le SMIC voire 10% au-dessus, ne peut prétendre au logement social. On a donc de nouveaux exclus : les salariés. Face au manque de logement, on demande des garanties pour louer. Deuxième élément : les charges du logement (chauffage, coût de l’énergie) sont exponentielles. Il faut additionner le prix du loyer pour les locataires, les charges d’électricité, avec des augmentations qui vont jusqu’à 20 à 30% alors que les salaires n’augmentent pas autant, voire baissent. Les taxes locales, avec la décentralisation de l’État qui a obligé les régions et départements à augmenter les impôts, les taxes d’habitation et les taxes foncières pour payer les transferts non compensés. Avoir un toit est le minimum dans une société qui se dit moderne.
 Sur la Ville, il y 0 ou 1 F5 qui se libère par an, quasiment la même chose pour les F4. Les personnes seules qui occupent ces grands appartements sont souvent des retraités qui sont arrivés il y a longtemps avec le loyer de l’époque. Mais aujourd’hui, ils restent car ils n’ont pas la possibilité, avec les baux qui ont changé et les loyers qui ont augmenté, de payer plus cher un appartement plus petit.
 Sur le blocage des loyers, il faut savoir que l’augmentation dans les HLM est réglementée. Tous les ans elle est environ de 2%, mais les HLM augmentent souvent plus. Il faut étendre les sanctions aux bailleurs qui ne respectent pas la loi. Dans le privé, c’est l’indice du coût de la construction qui donne le droit à une augmentation de loyer, qui est limitée là encore, mais pas respectée. L’Etat doit avoir un rôle à jouer pour diminuer le coût de production des logements, car ensuite il existera toujours une volonté, par exemple des propriétaires, de rentabiliser leur dépense en se rattrapant sur les loyers.
 Pour les familles qui habitent dans des appartements type F4 ou F5, petit à petit, les enfants s’en vont, et on se retrouve à 2 dans un grand appartement, sans pouvoir déménager car les autres loyers sont trop chers. À côté de cela, des familles cherchent des logements plus grands ; pourquoi les sociétés HLM ne proposent pas à ces personnes âgées de bénéficier d’un F3 ou du F2 au même prix que leur grand appartement, en récupérant la différence avec la nouvelle famille.

LA JUSTICE
 Il faut aussi réfléchir à une justice plus équitable : quand on est pauvre et que l’on se retrouve dans une situation de conflit, ou que l’on est victime, que l’on demande réparation, c’est souvent impossible car il faut des moyens pour payer un avocat et être correctement défendu. Par exemple, un motard qui se fait piquer sa moto, la police lui répond qu’il ne faut pas espérer la retrouver, mais pour le fils de Sarkozy, on a fait des prélèvements ADN, et le scooter a été retrouvé. Il y a deux poids deux mesures.
 Sur l’aide juridictionnelle, il faut aussi parler du cas du tribunal des prud’hommes. Aujourd’hui il n’est pas possible de se défendre, d’aller demander l’aide juridictionnelle. Il y a trop de demandes, ça prend 5 ou 6 mois car il y a d’autres priorités. Pas d’aide si pas de moyens

LA FISCALITÉ
 A quand la réforme fiscale ? Car l’état a besoin de prélever l’impôt, mais un impôt juste. Par exemple, la taxe d’habitation devrait inclure tous les revenus, ce n’est pas le cas aujourd’hui, c’est un impôt très injuste, et un des éléments de la réforme fiscale.
 La taxe professionnelle n’est pas la même partout, peut-on la baisser en France pour augmenter les salaires ? Et taxer les patrons qui font des énormes bénéfices pour redistribuer l’argent, payer le chômage et les RMI.

CONCLUSION, par Thierry MANDON

D’abord je voudrais dire qu’en deux heures de débat, ce que vous avez dit est à la fois très dense, et beaucoup ont parlé, et c’est souvent comma ça dans les dbétas participatifs qu’a voulu Ségolène, et je pense que c’est une très bonne méthode dans cette campagne, ou plutôt dans ce tout début de campagne, de partir des préoccupations des habitants et citoyens et donc de ceux que la gauche a à représenter. Moi ce que je retiens et ce que je transmettrais à Ségolène dès demain après-midi, c’est que cette question de la vie chère est une question extrêmement large. On est parti du logement, du travail, des salaires, et on aurait pu se dire qu’avec ça, il y avait suffisamment à dire et d’ailleurs de nombreuses propositions ont été faites, que je ne répète pas mais que j’ai noté.

Mais vous avez élargi le sujet, à juste titre, à la question de la santé, aux études et à la scolarité, à la retraite, à l’injustice du sytème des impôts, aux transports, à la question de la grande distribution, à la culture, au comportement des banques, au rôle de l’euro,… Bref : c’est un problème massif qui touche l’ensemble de notre vie quotidienne, et si en plus il y a dans la vie un accident de parcours, et aujourd’hui l’accident de parcours est malheureusement de plus en plus sûr, alors là, c’est la fin.

On voit bien que l’organisation sociale de notre pas par rapport à ce qu’est devenue aujourd’hui la réalité économique et sociale est complètement déconnectée.

Je retiens aussi combien nombre d’entre vous ont lié cette question de la vie chère à la question des droits, et donc de l’injustice. Quand on s’estime lésé dans ses droits, on ne peut pas se défendre car on n’a pas les moyens. Ainsi, nous avons une société qui vous menace de plus en plus, et qui vous interdit de faire valoir vos droits, qui certes a développé des systèmes d’aides mais trop complexes pour lesquels il faut investir de l’argent pour avoir des aides.

On a donc un système social en train de se déliter, et derrière vos propos, on voit bien l’immense sentiment d’injustice et en même temps un sentiment de chape de plomb, on ne sait plus comment faire par rapport à tout ce niveau d’injustice.

J’ai noté aussi un appel fort à la réglementation, à l’encadrement, à des règles nouvelles, qu’il s’agisse du blocage des loyers, qu’il s’agisse de règles beaucoup plus contraignantes sur l’accès au crédit, sur le comportement des banques ou de la grande distribution, c’est à dire des appels qui s’adressent à des choses qui sont exactement le contraire du libéralisme que propose les adversaires de Ségolène. En filigrane, et vous allez dire que c’est de l’idéologie, mais on part des problèmes du quotidien et ça nous fait formuler des appels à des choses, à des valeurs qui sont opposées à celles qui gouvernent aujourd’hui.

J’ai trouvé cette soirée extrêmement riche, extrêmement intéressante, et tout sera remonté. Certains d’entre vous ont posé des questions auxquelles nous n’avons pas répondu, non pas que nous ne les trouvons pas intéressantes et que nous n’ayons pas de réponses, mais simplement parce qu’à cette étape de la campagne, Ségolène a voulu d’abord écouter ce qui se dit, écouter les plaintes, laisser parler les gens y compris ceux qui n’ont pas l’habitude de parler en public. C’est un peu différent comme méthode de ceux qui pensent avoir toutes les réponses qu’il faut apporter, même quand ils gouvernent depuis 5 ans, mais je pense que c’est une bonne méthode, qui va se poursuivre dans les jours qui viennent. La semaine prochaine mercredi nous serons à Epinay sous Sénart à 20h sur les questions des sécurités, et jeudi nous serons à Saint Pierre du Perray sur l’environnement.

Demain nous aurions dû être à Draveil sur les questions liées à l’éducation. Malheureusement, les copains de Draveil m’ont expliqué que la salle qui avait été mise à leur disposition par la Mairie leur avait été finalement refusée au dernier moment, au prétexte de je ne sais quoi. Donc, demain nous serons quand même à Draveil pour expliquer ce qui s’est passé, mais on ne pourra pas faire un forum sur l’éducation en plein air, et donc nous reportons ce débat au mardi 6 février à 20h, toujours à Draveil, mais cette fois-ci au Centre de Loisirs de Champrosay, une salle qui nous appartient.

Tous ces débats ont été enregistrés, et même retranscrits en direct pour alimenter le site www.desirsdavenir.org sur lequel vous pouvez vous-même aller pour continuer le débat et faire des propositions.

Ségolène reçoit des comptes-rendus de centaines de réunions comme celle-là, sur toujours les mêmes thèmes, et on pense qu’il y en aura plus de 5000 en France, et elle a toute une équipe qui est en train de dépouiller tous ces comptes-rendus pour en faire une synthèse et alimenter ses propositions de campagne, et le 11 février prochain à 15h à Montreuil, elle présentera le compte-rendu complet de tous ces débats participatifs, et les propositions retenues. Venez y participer, c’est gratuit, et c’est public.

Dernière chose, je pense que vous avez eu raison ce soir de faire la liaison entre la question de la vie chère et la question de la mondialisation. De la baguette de pain ou de la paire de chaussures à l’avenir de la planète, car dans le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, ce sont des choses qui se rejoignent.

Je vous informe que Ségolène ROYAL a demandé à Farid, ancien syndiqué de l’usine LU, d’organiser une réunion qui se tiendra à Ris-Orangis sur la question des délocalisations qui ont eu lieu en France ces dernières années. Nous allons ainsi recevoir à une date prochaine, début mars, une réunion avec toutes les entreprises qui, comme LU, ont été délocalisées ces dernières années, avec les représentants syndicaux et les responsables de ces entreprises, pour essayer de réfléchir aux réponses à apporter à ce phénomène, à quelles actions on peut mettre en place pour le limiter et protéger beaucoup mieux les salariés.

Je remercie très fort tous les intervenants de ce soir.

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